Brada
Lettres d’une Amoureuse (Calmann-Lévy)
Mercure de novembre 1897 page 560
Je dois confesser humblement que connaissant la réputation élégante de Brada[1], je n’avais jamais lu un de ses livres. Je me défie des livres des femmes qui sont des grandes dames. C’est d’ailleurs idiot de ma part puisque le dix-huitième siècle est plein de grandes dames qui savent mieux écrire que les hommes d’aujourd’hui. Enfin, j’ai lu les Lettres d’une Amoureuse avec des terreurs ridicules et je suis revenue, charmée, à de meilleurs sentiments pour les femmes de réputation élégante. C’est joli, plus que joli, bien fait, dans une ligne de tendresse pure mais profonde. La pudeur n’y est inscrite que pour mieux relever la passion, la rendre plus vraie. Les détails sont très sincères et, sous la transparence de certains voiles, les frissons du corps humain ont une exquise poésie qui ne fatigue pas. Il faut beaucoup de tact pour écrire une lettre d’amour non vécue. Il faut beaucoup d’esprit pour oser écrire une vraie lettre d’amour. Et peut-être n’y avait-il qu’une femme pour savoir donner l’illusion que ces deux choses rares, l’amour et l’esprit, sont réunies dans ces fictives Lettres d’une Amoureuse.
Henrietta Sansom, comtesse de Quigini Puliga, dite Brada (1847-1938).