Georges Rodenbach
Le Carillonneur (Fasquelle)
Mercure d’avril 1897 pages 145-146
Le Carillonneur, de Georges Rodenbach, est plus un poème qu’un roman. Celui qui fit de mystérieux voyages dans les yeux, dans les miroirs et au fond du silence, en rapporte une Bruges de rêves qui, paraît-il, n’est pas la vraie… heureusement ! Fidèle au précepte du conteur qui doit transmuer l’or vil des réalités trop solides en des bulles féeriques, prismes aériens où tout vient se refléter en teintes aurorales, pour la plus grande gloire du mensonge… et du conteur, Georges Rodenbach nous offre sa ville, non celle des autres. C’est celle-là, justement, que nous désirions. Borluut monte à la tour pour sonner ses cloches comme y monte sœur Anne afin de voir venir la vie… et deux cloches lui répondent ne lui sonnant qu’un son : l’amour. Le légitime amour paisible du foyer, de la rue qu’on habite et du clocher qui ponctue vos prières, puis, le glas des mortelles passions, toutes les luxures, la volée furieuse des alleluia de la chair. Il se trompe. Les deux cloches sœurs ont tellement le même son, selon la différence de vent qui souffle ! Il épouse la luxure et pèche adultèrement avec la douce fille, sa compagne prédestinée. Il meurt de cette erreur, va s’engloutir au fond des cloches, âme damnée d’avoir trop et mal aimé, cherchant encore le divin leurre de l’harmonie finale. Autour du type de Borluut, diverses figures ombrées avec la science des peintres flamands, lesquels savent tout ce qu’il convient de placer autour d’un chaud rayon de soleil, ou d’un plat d’or, curieusement travaillé.
Le Rouet des brumes (Ollendorff)
Mercure de décembre 1900, page 798
Contes posthumes où se trouvent de très belles pages du regretté poète.