Auguste-Gabriel Faure
La dernière journée de Sapphô (Mercure)
Mercure de juin 1900, page 756
Hum !… Fichtre !… Oui, parfaitement !… Il s’agit d’un autre petit livre naïf. Mais d’une tout autre manière. Correctement écrit, un peu trop moderne pour chanter le temps ou Bilitis vivait, il a l’air d’une maquette pour grand opéra. Des décors sont tellement précis et ordonnés selon les choristes et ces dames du ballet que vraiment on attend les trois coups et il vous arrive six vierges prêtes au supplice amoureux ! Vous ne désirez pas que je vous en fasse la description, hein ! Sachez seulement, jeunes et vieux, que certain couteau d’or en forme de phallus… Bien bizarre cette mode antique et pourquoi diable n’avait-on recours au bourreau lui-même (j’oublie que le bourreau en cette circonstance était l’intrépide Sapphô… sur deux p). Le décor change brusquement quand Sapphô aperçoit le beau Phaon… lequel ne veut rien savoir… et après quelques échanges d’invectives d’où la vertu de l’homme sort absolument victorieuse et le couteau du sacrifice rentre en lui-même, Sapphô va se précipiter dans la mer. (Orchestre.) C’est très joli, mais le talent de Pierre Louÿs a empoisonné plus de gens, ma parole, que le couteau phallique n’a dû tuer de vierges.