Pierre d’Alheim

La Passion de Maître François Villon (Ollendorff)

Mercure de février 1900, pages 455-456

Gros effort à tenter que de faire vivre une figure si peu connue en un roman plus près de l’œuvre psychologique, certes, que du roman d’aventures, et avec les poésies d’un homme de ce temps lointain lui restituer une vie amoureuse et sociale, plutôt anarchique vraiment que sociale. L’auteur s’est tiré de ce colossal travail à son honneur. Il nous a donné un personnage doux, une sorte de Christ précurseur de toutes les poésies en révolte contre les sociétés. Ce Villon n’a rien du vaurien ni du bateleur qu’on entrevoit dans l’histoire. Il nous déconcerte, heureusement. On nous en offre un visage atténué par une sorte de fatalité, comme le serait l’effigie du Dieu sur le lin de Véronique. Les femmes qui essuyèrent la sueur de cette face durent la recréer plus tendre et toutes ces prisons subies lui coulèrent en les membres le plomb mystérieux de la philosophie. La langue de ce livre est soignée mais point trop moyenâgeuse à lire. Et puis (qu’on se le répète) c’est le roman de toutes les passions de Maître Villon, un Dieu ! Tout ce qui vient de lui est sacré.